La dynamique de groupe en analyse des pratiques professionnelles

La dynamique de groupe en analyse des pratiques professionnelles (APP) est un des éléments clés de l’animation. J’ai repéré quelques situations que tout superviseur sera amené à rencontrer dans sa pratique et que j’avais envie de partager avec vous :

  • « Nous ne voulons pas que vous soyez là ! » :

Une situation que tout superviseur en APP a déjà rencontré : le groupe que vous animez n’est pas partie prenant de l’APP et vous le fait savoir clairement. Cette situation vous indique que vous avez affaire à un groupe qui n’est pas suffisament sécurisé. Il y a de multiples raisons possibles : les participants ne se connaissent pas, il y a une problématique institutionnelle lourde,  ils sont dans un contexte de crise… Le risque pour le superviseur dans ce genre de situation est de vouloir convaincre le groupe d’adhérer à la démarche de l’APP et de rentrer plus ou moins ouvertement en conflit avec les participants.

Dans ce genre de situation, il est important pour le superviseur d’avoir en tête que ce n’est pas à lui de régler cela. Il peut aider le groupe à élaborer les enjeux qui se manifestent à ce moment là pour éclaircir la situation. Par contre il est fondamentalement contre productif d’engager un travail d’APP si le groupe n’est pas partie prenant.

J’ai rencontré plusieurs directeurs  d’établissements qui se sont rendu compte après plusieurs années d’APP que cet espace n’était pas investi en tant que tel mais qu’il s’y passait tout autre chose, en particulier des règlements de compte entre collègues ou vis à vis de l’institution.

Il est donc préférable, à mon sens, d’en référer au directeur d’établissement afin qu’il aide les participants à élaborer une demande claire, quitte à proposer un autre cadre de travail : supervision, régulation d’équipe…

  • « C’est quoi qu’il faut faire ? »

La recherche de solution immédiate donnée par le superviseur. Typiquement une personne présente sa situation, la termine et tout le monde se retourne vers le superviseur en attendant sa réponse à la question posée. A ce moment là, il est fondamental de repérer ce processus pour s’en dégager et s’appuyer sur différentes techniques d’animation : la circularité de la parole, l’exploration de la question ou du contexte… Le superviseur peut alors mobiliser les ressources du groupe et s’appuyer sur la dynamique de groupe et les compétences des participants plutôt que de se positionner comme celui qui sait. Ceci n’élude pas la question des représentations du superviseur et de comment il arrive à les mettre en discussion dans le groupe sans se positionner de manière haute.

  • « On a rien à dire »

Vous l’aurez remarqué, il arrive que parfois, dans le même groupe, personne n’ait de situations à aborder. Cela arrive une fois, puis deux, puis systématiquement. Dans ces moments, le superviseur peut se sentir mal à l’aise, faire preuve d’impatience, le prendre pour soi… Permettre au groupe de laisser place au silence sans malaise est une démarche importante en APP. Le groupe peut ne pas avoir de situations à aborder car il s’est passé quelque chose récemment d’important auquel tout le monde pense, le groupe n’est pas suffisamment sécurisé, les participants ont besoin de temps pour se mettre dans la dynamique de l’APP… 

Il est important d’accorder la possibilité au silence, de l’accueillir avec bienveillance et de ne pas chercher à le résoudre. C’est de la responsabilité des participants d’amener des situations et de la responsabilité du superviseur  à les explorer avec le groupe.

  •  « J’ai raison et tu as tort »

Dans cette dynamique là, le superviseur observe deux personnes, voire deux groupes qui s’opposent pendant la séance. Les uns invalident les autres et vice et versa. Le superviseur risque de vouloir faire l’arbitre entre les deux camps, au risque d’être lui même rapidement invalidé.

La position méta du superviseur à ce moment là est incontournable pour comprendre ce qu’il se passe et aborder la question du processus (invalidation, opposition, dénégation…) plutôt que la question des contenus. En quoi ce qu’il se passe dans le groupe nous aide à comprendre les processus qui entrent en résonnance avec la situation ou le contexte évoqué ?

Traiter le désaccord en termes de différence et avec humanité tout en se focalisant sur le processus permet de traiter directement la problématique en la dépassant.

Comprendre la dynamique de groupe en analyse des pratiques professionnelles n’est pas inné, cela s’apprend et s’expérimente. C’est une des dimensions fondamentales de toute intervention de supervision en institution.

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